La mémoire du Front Populaire au Festival du Court Métrage de Clermont-Ferrand
Ce sont deux documents exceptionnels autant par leur charge symbolique que par leur valeur historique et patrimoniale de la mémoire ouvrière qui sont présentés par Tangui Perron (1) dans le programme « Court d’Histoire », dans le cadre du Festival International du Court Métrage de Clermont-Ferrand (2). Le premier, produit par le Comité National d’Organisation du Rassemblement Populaire du 14 juillet 1935, a été réalisé par le Service Cinématographique de la SFIO et l’Association des Ecrivains et Artistes Révolutionnaires. On en doit la sauvegarde aux Archives du film d’Etat de la DDR, l’ex République Démocratique d’Allemagne de l’Est.
C’est la mémoire en 20 minutes de la grande journée du 14 juillet 1935, première manifestation unitaire organisée par les groupements du Front Populaire à la suite des assises du Vélodrome de Buffalo à Montrouge. Cette journée mémorable fut suivie de l’immense manifestation de la Bastille à la porte de Vincennes à Paris. Des différents quartiers de Paris converge une foule immense et joyeuse, qui défile le poing tendu en entonnant la Marseillaise et l’Internationale. Une grande banderole rappelle le serment de Buffalo : «Nous faisons le serment solennel de rester unis pour désarmer et dissoudre les ligues factieuses, pour défendre et développer les libertés démocratiques et pour assurer la paix humaine». Il s’agit donc d’un moment clé de la constitution du Front populaire prémonitoire de sa victoire électorale.
Outre la photogénie de la manifestation le son a été enregistré, ce qui témoigne de l’importance accordée à l’événement, et permet d’entendre les chants et cris scandés par la foule : “Du Travail et du pain!”, “L’unité vaincra!”, “Front Populaire!”…
Le second documentaire de 13 minutes Grèves d’occupations, témoigne des manifestations et grèves de juin 1936 en région parisienne, principalement aux usines Renault de Billancourt et à Boulogne, Gennevilliers et Epinay-sur-Seine aux studios et laboratoires de cinéma. Le film insiste sur la culture et le folklore ouvriers, toujours empreints de festivité. Filmé en juin 1936, monté et commenté à postériori, ce fut un des films les plus diffusés dans les circuits militants du Front Populaire. Ce document précieux sur la culture et les défilés ouvriers signe également une des toutes premières rencontres entre le monde ouvrier parisien des métallos en particulier et une partie du monde du cinéma – les travailleurs du film et leur syndicat.
(1) Historien, chargé du patrimoine à Périphérie (centre de création documentaire). Collaborateur à Positif, il a écrit plusieurs ouvrages et articles scientifiques consacrés au cinéma militant et au rapport entre mouvement ouvrier et cinéma.
(2) http://www.clermont-filmfest.com/