« C’est la première fois que l’on découvre en France un décor comme on en connait à Pompéi » a fièrement annoncé l’archéologue Alain Genot, l’un des co-reponsables de la fouille menée depuis le 1er avril sur le site municipal de La Verrerie, à Trinquetaille.
« Cette découverte est extraordinaire. Des ensembles de ce type sont inédits en France et n’existent que dans une demi-douzaine de maisons romaines en Italie?! » Alain Genot, archéologue au Musée de l’Arles antique n’en revient toujours pas.
Les recherches menées par le service archéologique du Musée départemental Arles antique portent sur les vestiges d’une maison datée du 1er siècle avant J.-C. L’équipe, dirigée Marie-Pierre Rothé, secondée par Alain Genot et Julien Boislève, archéologue et spécialiste des enduits peints à l’Inrap, et renforcée du concours de chercheurs de l’Inrap, du Cnrs, de l’Université Aix-Marseille et de nombreux étudiants et bénévoles, s’attendait à tomber sur des vestiges exceptionnels. En effet, l’été dernier, lors de la première phase de fouilles, les scientifiques avaient révélé des fragments de ces fresques en travaillant sur une autre pièce de cette demeure. Ils avaient déjà réuni quatre-cent-vingt caisses de fragments.
UNE DÉCOUVERTE EXTRAORDINAIRE
Il y a quelques jours à peine, ils ont mis au jour ces nouvelles fresques, extraordinaires au sens premier du terme par leur dimension, la richesse et la fraîcheur de leurs coloris et par leur présence même en France. Le décor comprend des colonnes peintes imitant le marbre, entre lesquelles sont représentés des personnages. Quatre visages ont été dévoilés, les archéologues pensent que la pièce en comptait onze en tout. « On trouve très peu de décors dits de IIème style Pompéien en France, et aucun aussi bien conservé, précise Marie-Pierre Rothé. En Italie, on n’en connait qu’une douzaine. Arles compte un décor semblable à celui de la Villa des Mystères à Pompéi. » On comprend mieux pourquoi le ministère de la Culture a qualifié cette recherche d’indispensable et que Fleur Pellerin, au cours de sa visite à Arles le 7 juillet dernier, ait réservé quelques instants d’un programme très chargé pour aller voir les fragments d’ores et déjà mis à l’abri.
QUE NOUS DISENT CES TRÉSORS SUR LA MAISON DE LA VERRERIE ?
« Il s’agit certainement de la demeure d’un personnage important, issu de l’élite, qui a aménagé des pièces de réception, précise Julien Boislève. A cette époque, la peinture est réservée aux plus riches et le pigment vermillon est un pigment de luxe. La qualité des dessins témoignent d’un travail très qualifié, d’un artisan appelé spécialement d’Italie« .
Julien Boislève, l’un des archéologues responsables de la fouille, devant les enduits retrouvés sur place. photo R. Boutillier/ville d’Arles.
QUELLE SERA LA SUITE DES OPÉRATIONS?
Les archéologues vont continuer à travailler sur le site jusqu’au 31 juillet. Les fragments vont être réunis dans des caisses et les enduits au mur seront déposés par l’équipe de l’atelier de restauration du Musée.
Les archéologues reviendront sur le terrain l’été prochain pour mener la troisième et dernière campagne de fouilles sur la maison. « A la fin, nous nous attendons à réunir mille caisses environ de fragments » prévoit Alain Genot. Commencera ensuite un véritable travail de puzzle – les fragments étant examinés un à un, nettoyés et placés de façon à reconstituer le décor peint. « On compte environ une journée d’étude par caisse » précisent les chercheurs.
Ce n’est qu’une fois les travaux de reconstitution puis de restauration achevés que nous pourrons voir ces merveilles exposées au Musée. Il faudra donc patienter 8 à 10 ans.
Mais tous les spécialistes s’accordent pour dire que cette découverte aura des répercussions à plusieurs niveaux. Pour le Musée départemental Arles antique en enrichissant ses collections d’un nouveau trésor, après le buste de César et le chaland Arles-Rhône 3. Pour Arles bien sûr, en créant un nouveau pôle d’attractivité et enfin pour la connaissance de cette époque. Comme l’a annoncé avec jubilation un représentant du ministère de la culture, « un pan de l’histoire locale s’ouvre ». Et c’est à Arles que cela se passe.