Le projet fou de la restauration de la Scala de Paris

Un projet fou assurément. Le pari d’ouvrir en juin 2018 sera t-il tenu ? Dans l’état où nous avons trouvé le chantier qui, pourtant, fonctionne à fond, nous doutons mais Frédéric Biessy, lui, propriétaire des lieux, ne doute pas le moins du monde.
Compte-rendu d’une visite édifiante.

Cette vieille salle parisienne aux vies multiples va renaître de ses cendres grâce à Mélanie et Frédéric Biessy. Le?chantier est lancé pour une ouverture en juin 2018.
Quelle aventure que celle de la Scala !

La veuve d’un industriel du Nord, amoureuse de la Scala de Milan, décide de copier la prestigieuse salle italienne, en version plus modeste (1.400 places), pour y faire un café-concert élégant : un parterre, trois balcons bleu et or, une coupole vitrée qui s’ouvre sur le ciel pour l’aération, des treuils mécaniques pour acheminer dans les étages l’absinthe… C’était en 1873. Depuis, la Scala a connu des destins pour le moins insolites mais aussi prestigieux à certaines périodes. En 1895, Édouard Marchand monte à la Scala la première grande revue de music-hall à l’anglaise en France. Toutes les grandes vedettes du caf’conc’ s’y produisent : Polin, Yvette Guilbert, Fragson, Mayol, Polaire, Paulette Darty, Max Dearly, Mistinguett…

En 1916, la Scala est utilisée comme théâtre de vaudeville, où se produisent Pauline Carton ou Marie Dubas et où l’on joue Feydeau. La salle est modernisée en 1926 et accueille Raimu, Georgius, Dranem, Fréhel et en 1934, en guise de final, le tour de chant de Damia.
scala_ancienne.jpg
L’ancienne façade

En 1936, la Scala est confiée à une société d’exploitation cinématographique, et transformée en une salle de cinéma de 1 000 places par l’architecte Maurice Gridaine dans le style art déco, À partir de 1977, le volume est divisé en cinq salles et la programmation est désormais consacrée au cinéma porno, voire même un vrai lupanar !. La salle ferme au cours de l’été 1999.

Quelques mois plus tard, la Scala est rachetée par l’Église universelle du royaume de Dieu, devenue depuis Centre d’accueil universel, pour en faire un lieu de culte, mais les oppositions du quartier amènent la mairie de Paris à refuser les permis de construire successifs. La salle était fermée en 2009 et mise en vente.La ville de Paris a envisagé d’y installer des logements sociaux et une pépinière d’entreprise, loin du projet du producteur de cinéma, Maurice Tinchant, qui, en 2000, souhaitait faire renaitre ce lieu en un cinéma d’art et d’essais. Abandonné, l’endroit a dès lors l’aspect d’un hangar vide où les pigeons avaient élu domicile et qu’il a fallu faire fuir avec l’aide d’un fauconnier. Puis, lorsque le couple Biessy a repris la Scala,il se posait un véritable problème : pas de possibilité d’établir une sortie de secours. Après bien des recherches et tractations diverses,on a enfin trouvé où pourrait être cette fameuse sortie afin d’obtenir l’agrément d’ouverture. Ouf !

Dès lors, le chantier a pu s’ouvrir et fonctionne à toute vitesse. On creuse à 5 mètres sous le niveau actuel, on envisage un restaurant et la salle de spectacle modulable devrait accueillir environ 600 places. Alors, pari tenu ? Frédéric Biessy en est sûr. Rendez-vous donc en juin 2018..

G. Levet

VIDEO : Sophie Laurant rencontre F. Biessy après la visite AJP :

Share This Post